L’étrange royaume de Rouen – 8 –

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Sophie sortit de la salle d’interrogatoire. Elle se rendit immédiatement dans la pièce d’à côté où ses collègues et le psy ne manquaient rien de ce qui se passait avec Monier.

« Il faut trouver ce frère ! Il est peut-être en train de commettre un meurtre, au moment même où nous parlons. »

Les policiers s’activèrent…

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Une heure plus tard…

Le brigadier Sophie Hamel de nouveau fit face à Bertrand Monier.

 

« Nous avons retrouvé ton frère.

–          Pas possible ! s’exclama Monier

–            Pourquoi pas possible ?

–            Il est insaisissable !

–            Ecoute… on l’a trouvé. Quel véritable lien avais-tu avec ce frère ?

–            Nous avons les mêmes liens que tous les frères ont !

–            Tous les frères ?

–            Je comprends pas ce que tu racontes ?

–            Lui, te considérait-il comme ton frère ?

–            Bien sûr !

–            Vous aviez la même mère par exemple ?

–            Euh…

–            Je ne sais pas, est-ce que vous alliez à l’école ensemble ?

–            Bah… je ne sais plus.

–            Qui est l’ainé, par exemple ?

–            C’est… c’est moi, je crois !

–            C’est quoi sa date de naissance ?

–            Le… on ne fêtait pas les anniversaires chez nous !

–            Soit, il est comment ? Grand ? Petit ? Sympa ? Bref, tu vois ce que je veux dire ?

–            En quoi c’est important ?

–           Disons que c’est le genre d’information à connaître sur son frère. Sa date de naissance, si c’est notre petit ou grand frère. Petit, à quoi on jouait ? Si on était ou pas dans la même école. Enfin, les gens normaux savent ce genre de choses.

–            T’es en train de dire que je ne suis pas normal, c’est ça ?

–            Non, je suis en train de dire que t’es un taré ! C’est pas pareil !

–            Je crois que t’as plus rien à dire, c’est pour ça que tu m’insultes !

–            Non !

–            Alors… pourquoi ?

–            T’as pas de frère, espèce de malade ! hurla Sophie. La fraternité ce n’est pas comme ça que ça se conçoit.

–            Je ne comprends pas ! Je crois que c’est toi la tarée !

–            Je vais te buter, sale merde ! dit Sophie en contournant la table.

Ce fut à ce moment que Tran entra dans la salle. Connaissant son amie et collègue mieux que les autres, il perçut immédiatement qu’elle perdait pied.

Il s’interposa entre elle et Monier. Le visage, de ce dernier, traversé de tics trahissait sa rage. Il fulminait littéralement. Voyant l’inspecteur, la jeune femme revint à la raison, elle sortit de la salle.

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Tran s’assit face au psychopathe qui fixait haineusement la porte par laquelle lui échappait une victime dont il aurait répandu les tripes avec joie. Lorsqu’il se tourna enfin vers l’inspecteur, il essayait de maitriser les nombreux spasmes de jouissance que lui procuraient ses idées malsaines, réfrénant dans le même temps un sourire.

–            Inspecteur, que puis-je pour vous ? demanda-t-il, d’une voix étrangement autoritaire

–            Rien, malheureusement, monsieur Monier. Enfin, juste la vérité !

–            Oui, je n’aime pas parler aux hommes !

–            Je me doute, mais ça sera moi et personne d’autre, désormais.

–            Je veux le brigadier !

–            Je n’accèderai pas à votre requête. Ici, c’est moi le patron, et c’est moi qui donne les ordres ! Ok, monsieur Monier ? clarifia avec une sereine autorité Olivier Tran. Les choses s’étaient inversées. Alors, votre frère ? Quel est son vrai nom ?

–            Je ne sais pas ! Je ne le lui ai pas demandé.

–            Ok ! Tu l’as connu comment ? demanda Tran en se massant les tempes

–            Il était à la Providence.

–            Providence ?

–            Oui, l’école.

–            Comment t’as fait…

–            Je lui ai proposé d’organiser une fête chez moi. Et il voulait voir comment la maison était agencée. Je lui ai dit qu’il y avait une piscine. Et il a mordu à l’hameçon.

–            Tu l’as tué ce jour-là ?

–            Non, pas tout de suite. Je voulais pas le tuer. Je voulais qu’il devienne mon frère.

–            Ça a marché ?

–            Quand je lui ai accordé ma confiance il a essayé de fuir. Je ne supportais pas de le perdre. Pour le garder près de moi… il fallait que…

–            Pourquoi lui ?

–            Toutes les filles l’aimaient. Je me suis dit qu’avec un grand frère comme ça, elles m’aimeraient aussi.

–            Bertrand, ça ne marche pas comme ça.

–            Personne ne m’a rien expliqué inspecteur, répondit le gamin qui subsistait en lui. Personne. Je voulais juste plus être seul.

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